Tirer les leçons des expériences douloureuses
On accuse souvent les occidentaux, en particulier les Américains, de former une société obsédée par le bonheur : les ouvrages de mieux être proposant des solutions rapides et faciles et garantissant une existence sans conflit se vendent comme jamais, et certains psychiatres prescrivent des médicaments au moindre signe d’inconfort affectif. Ces critiques sont justifiées dans une certaine mesure, mais elles se trompent d’obsession en désignant le plaisir et non le bonheur. Le « meilleur des mondes » [Expression tirée du titre du roman d’Aldous Huxley] des solutions rapides et indolores ne se préoccupe nullement besoin de sens. On ne peut accéder au bonheur authentique sans une certaine proportion de malaise affectif et de stade pénible, que ces ouvrages et les psychotropes tente parfois de circonvenir. Mais le bonheur présuppose la nécessité de surmonter des obstacles. Pour reprendre les termes de Viktor Frankl, « ce dont l’homme a véritablement besoin, ce n’est pas de l’absence de tensions, mais du combat obstiné pour le but qui juge digne de lui. Ce qu’il lui faut, ce n’est pas l’élimination à tout prix de ses tensions, mais l’appel d’un sens qui est là en puissance et attend qu’il vienne l’adopter ». Il ne faut pas oublier que les phases difficiles augmentent la capacité à apprécier les plaisirs ; en effet, elles nous évitent de considérer ces derniers comme un dû, et nous rappellent qu’il faut être reconnaissant pour les petits plaisirs comme pour les grandes joies. Cette gratitude-là peut être, elle-même, source de plaisir et de sens véritable.
Repensez à un moment difficile ou douloureux de votre vie.
Quelle leçon en avez-vous tirée ? En quoi cela vous a-t-il fait avancer ?
TENTEZ L’EXPERIENCE…
Tenir le journal de ses malheurs
James Pennebaker, de l’université du Texas, a montré qu’on faisait mieux face aux difficultés quand on les mettait par écrit. Pendant quatre jours d’affilée, il a demandé aux volontaires de son expérience de passer 15 à 20 minutes à décrire ce qui les avait perturbés ou carrément traumatisé. Il leur avait garanti la confidentialité totale et demandé d’être aussi sincère que possible. Résultat, cette heure d’écriture étalée sur quatre jours a nettement soulagé le sentiment global d’angoisse des participants tout en augmentant leur impression globale de bonheur et en améliorant leur état de santé.
Sur une feuille blanche, pour ne pas être limité par la place, suivez pendant quatre jours, à raison de 15 à 20 minutes par jour, les instructions de Pennebaker : décrivez, sans vous interrompre l’expérience la plus perturbatrice ou la plus traumatisante de votre existence. Ne vous souciez ni de grammaire, ni d’orthographe, ni de « bien écrire ». Il faut que vous évoquiez ce que vous avez pensé et ressenti au plus profond de vous-même à cette occasion quelle qu’elle soit, du moment qu’elle vous a affecté de manière significative.
Choisissez de préférence un événement dont vous n’avez jamais parlé en détail à personne. Il est extrêmement important que vous vous laissiez aller à rentrer en contact avec les pensées, les émotions qui gisent au tréfonds de vous-même. Autrement dit, racontez ce qui s’est passé, comment vous avez réagi sur le plan affectif, et dites quels sentiments cela vous inspire aujourd’hui. Pour finir, vous pouvez évoquer les traumatismes différents chaque jour, ou bien le même pendant toute la durée de l’expérience. Le choix du traumatisme abordé dépend entièrement de vous.
Et si cette réflexion vous inspire des projets ou des actions
pour vous sortir du traumatisme… Parlons-en !
Psychologie HS n°44, page 46