Dans l’entreprise, le manager joue un rôle majeur dans le sentiment de satisfaction de son équipe. A la clef : moins de stress, d’absences, de turnover, et une efficacité plus grande. Lors de formations sur le nouveau mode managérial que je propose actuellement à un groupe français, je perçois le paradoxe vécu par les managers d’équipes : Ils ont parfaitement conscience que le bien-être au travail est devenu incontournable… et pourtant ils demeurent souvent en peine d’envisager des modes opérationnels tenant compte à la fois la performance et le bien-être !
« En créant af83, nous voulions être contents d’arriver au bureau le matin ! » lance Ori Pekelman, directeur technique de cette société parisienne de 60 salariés, dans le secteur de l’informatique et du design. La mise en place d’un « environnement de travail non hostile » est facteur d’efficacité et de productivité.
Non seulement af83 a résisté à la concurrence, mais le turnover est faible, « et nous recevons deux à trois candidatures spontanées par jour », ajoute Ori Pekelman. Voici quatre pistes pour améliorer l’organisation du travail.
1. Prendre un bon départ
« Une grande part du bien-être du salarié se joue dès sa prise de fonction », avertit Jean-Claude Delgenes, fondateur du cabinet Technologia. Ce spécialiste des risques professionnels a vu certains employés jusque-là compétents sombrer à la suite d’une promotion, faute d’accompagnement. Le manager de proximité a donc intérêt à faire du « tuilage » afin que la recrue soit à l’aise dans ses nouvelles responsabilités.
Mieux vaut aussi prévenir le service de son arrivée, en (re)définissant les attributions de chacun. Organiser une réunion ou un café de bienvenue est une bonne occasion pour que le nouveau venu se présente. Et pourquoi ne pas lui trouver également un salarié « parrain » ou lui proposer de commencer en binôme ?
A faire aussi
Une semaine après l’arrivée, prendre le temps d’écouter la personne : « Comment se sont passés ces premiers jours ? Quels sont vos besoins ? Comment ressentez-vous cette prise de fonction ? » Il faut « annoncer à la personne que ce point d’avancement aura lieu non comme un contrôle intrusif ou une évaluation prématurée de ses performances, mais comme un moyen de trouver, en cas de problèmes, des solutions rapidement ».
2. Autoriser la flânerie
« Dans des structures en changement permanent, adeptes du lean management (réduction des pertes) et de la chasse aux temps morts, les gens disent qu’ils n’ont plus le temps de souffler ni de bien travailler », déplore Norbert Alter. Pour le codirecteur du master Management, travail et développement social à l’université Paris-Dauphine, « il devient urgent de redonner aux salariés le temps de flâner » car c’est justement durant les pauses et les causeries qu’ils échangent contacts, idées, solutions… « Et cette coopération est au cœur de l’efficacité. »
Dans l’openspace d’af83, des salles de réunion mobiles permettent aux gens de s’isoler pour discuter. Et, le soir, le coin cuisine est fréquenté par des collègues qui préfèrent rester dîner ensemble en bavardant. Débats techniques et cohésion d’équipe garantis.
A faire aussi
Comme au centre Renault de Guyancourt, instaurer des journées annuelles durant lesquelles les salariés discutent du travail, des problèmes et des solutions. A Noël, pour un départ à la retraite…, on peut aussi abandonner les discours, que personne n’écoute, et laisser le personnel organiser une petite fête à sa guise.
3. Anticiper la charge de travail
Demander à l’équipe d’être en permanence sur la brèche est impossible. « Au lieu de se contenter de répartir la charge de travail, il faut l’anticiper, estime Jean-Claude Delgenes. En étudiant les trois dernières années, il est possible de planifier les six mois à venir et de caler les moyens. »
Af83 a opté pour la méthode suivante : « On fixe la date limite avec le client, on estime l’effort à fournir et la taille de l’équipe, puis on hiérarchise les priorités et le degré de qualité nécessaire. On passe plus de temps sur les choses importantes, et les salariés sont fiers du résultat. »
A faire aussi
L’incertitude et le manque de visibilité se révèlent une source majeure de mal-être, il faut annoncer le plus tôt possible l’arrivée d’un surcroît de travail. Et préciser àgalement sa durée : « Les jours à venir seront chargés, on devra se serrer les coudes. En revanche, la semaine d’après sera calme. »
Pour en savoir plus :
Donner et prendre. La coopération en entreprise, par Norbert Alter (éd. La Découverte).
Ces entreprises où il fait bon travailler. Qui sont-elles, que font-elles et pourquoi ça marche ?, par Michael Burchell et Jennifer Robin (éd. Pearson).
4. Cautionner certaines transgressions
Lorsqu’un salarié contourne une procédure bureaucratique pour être plus efficace, cette transgression risque de l’angoisser. « Le manager, estime Norbert Alter, doit soutenir l’initiative du collaborateur et traverser « l’édredon » hiérarchique pour faire remonter les observations de terrain jusqu’à l’état-major, afin de rendre la procédure plus intelligente. »
Dans des organisations de plus en plus technocratiques, « il faut retrouver l’identité collective et l’esprit de métier, celui du compagnonnage, en s’intéressant à la façon de travailler plus qu’au respect de règles dogmatiques ». Chez af83, les procédures sont certes nombreuses, mais c’est une « co-création avec les salariés, pour ne pas reproduire certaines erreurs. »
A faire aussi
Plutôt que de se plier à des diktats absurdes, il est préférable de se faire remarquer comme un manager visionnaire qui suggère des façons d’améliorer le produit. Au besoin, recourir à des experts externes pour se faire entendre.
Je viendrai alors volontiers vous y aider !
Article repris de Myriam Greuter