L’art de retirer des bénéfices
Pourquoi certaines personnes qui ont tout pour être heureuse, qui ont réalisé leurs rêves et réussi dans la vie sont-elles malheureuses comme les pierres alors que d’autres, qui accumulent malheur sur malheur, montrent une perpétuelle joie de vivre ? Ce qui explique ce phénomène aussi banal que stupéfiant, c’est que le bonheur n’est pas seulement fonction des événements mais aussi de notre manière subjective de les interpréter. Par « événement », j’entends aussi bien remporter un championnat, obtenir une note médiocre à un examen, faire fortune ou voir partir sa compagne ou son compagnon. Notre façon de réagir à ces événements est largement conditionnée par l’interprétation que nous en donnons et l’aspect sur lequel nous décidons de nous focaliser : vais-je fêter ma victoire, mes réussites, ou les trouver normales et regretter amèrement de ne pas avoir fait encore mieux ? Vais-je me reprocher cette mauvaise note, ce rejet de la part de mon ou ma partenaire, ou me concentrer sur les leçons à tirer de cette expérience ?
Nul n’est à l’abri de la tristesse et du chagrin. Mais certains savent voir le côté positif des choses – ils savourent leur succès comme ceux des autres, ils ont le chic pour retourner à leur avantage les situations défavorables, ils ne se défont jamais de leur bel optimisme. Tandis que d’autres perçoivent toujours le côté sombre, ne trouvent presque jamais de raisons de se réjouir, semblent perpétuellement mécontents et traversent la vie en traînant avec eux une aura de pessimisme morbide.
Dans le premier cas, on a affaire à l’archétype du dénicheur d’avantages – celui qui sait qu’à quelque chose malheur est bon, qui voit les choses du bon côté, ou prend la vie du bon côté, fait avec ce qu’il a… et ne stigmatise pas les auteurs qui ont trop recours aux clichés. L’autre archétype correspond à l’individu que Thoreau appelait « vétilleux », celui qui « trouve des défauts à tout, même au paradis». Celui-là sera malheureux quoi qu’il arrive.
Je ne prétends pas que tout est toujours pour le mieux, mais je crois que certaines personnes savent tirer le meilleur parti de ce qui leur arrive. Dire que « c’est comme ça », que « tout est pour le mieux », c’est adopter une attitude passive. Dire au contraire qu’il faut « faire pour le mieux », voilà une posture constructive.
Pour les vétilleux, ceux qui ne sont jamais contents, il n’existe pas de réussite capable d’entraîner un bonheur durable, et chaque échec sert à justifier leur pessimisme à leurs propres yeux. À l’inverse les gens qui apprennent à se focaliser sur les côtés positifs de chaque situation peuvent tirer profit à la fois du succès et de l’échec. Où qu’ils se tournent, les chercheurs de bénéfices, les optimistes, distinguent une occasion d’évoluer positivement et de fêter ce qui leur arrive.
Vous considérez-vous plutôt comme chercheur davantage ou comme un vétilleux ?
Dans quel domaine de votre vie avez-vous plus tendance à voir les choses du bon côté ?
TENTEZ L’EXPERIENCE…
La reconstruction cognitive
La reconstruction cognitive peut nous aider à changer pour devenir des chercheurs d’avantages, à dépasser les conséquences malheureuses d’un échec, à prendre le temps de nous demander ce que nous avons appris de telle ou telle expérience, même pénible, et de quelle manière elle peut contribuer à notre maturité.
Décrivez quelques événements choisis de votre existence, d’abord sous l’angle vétilleux de Thoreau, puis sous l’angle chercheur d’avantages. Si vous prenez le cas d’un examen auquel vous avez échoué, par exemple, évoquez d’abord l’humiliation que vous avez ressentie, puis comment cet échec vous a fait comprendre l’importance du travail acharné. N’oubliez pas que le chercheur d’avantages ne pense pas nécessairement que « tout est pour le mieux », qu’il n’est pas forcément heureux quoi qu’il arrive. Dites-vous bien que, au contraire, il prend acte de l’événement puis entreprend d’en tirer le meilleur parti.
Et si ces questions vous intéressent aussi
pour des rituels professionnels… parlons-en !
Psychologie HS n°44, page 70